AVISTRAT – L’avenir se décide dès aujourd’hui (article complet)
Actualité
11 Oct, 2024

© Payerne Airport

Fin septembre, AERIA+ s’est associée à ASAPAYERNE, pour proposer une journée riche en discussions sur AVISTRAT, le projet de stratégie en matière d’espace aérien, avec un accent particulier sur les besoins du secteur et son avenir. Dans ce dossier, nous vous proposons de découvrir un retour complet sur cette manifestation, pour mieux comprendre l’opportunité et les défis de cette future stratégie fédérale. 

L’événement a aussi bien rassemblé des acteurs clés de l’industrie aéronautique que des responsables politiques, pour discuter de l’avenir de l’espace aérien suisse. Celui-ci a été inauguré par un mot de bienvenue du président d’AERIA+, Jean-Marc Probst. En soulignant l’importance de cette rencontre dans le cadre des évolutions stratégiques à venir pour l’espace aérien en Suisse, l’entrepreneur a rappelé que «le monde de l’aviation est à nouveau en plein essor, avec un probable doublement d’ici 20 ans des 4,3 milliards de passagers comptabilisés dans le monde en 2023». 

Un outil essentiel pour la Suisse 

Revenant à des considérations plus helvétiques, le président d’AERIA+ a rappelé l’importance du secteur pour notre pays. En effet, la Suisse «compte 190’000 personnes actives dans l’aviation avec des emplois directs», un secteur qui impacte la prospérité de toutes et tous puisque «la connectivité aérienne est nécessaire pour 50% des exportations en valeur  ainsi que pour accueillir 35 % de nos visiteurs». 

Alors que l’association existe pour «promouvoir et défendre une infrastructure romande performante dans l’intérêt de l’économie romande», Jean-Marc Probst se réjouit des «62% de votants qui ont accepté la nouvelle longueur de la piste de l’aéroport de Zurich». Un résultat qui montre que le sujet est bien compris de la population, une fois les enjeux expliqués de manière pragmatique, en dépassant les simplifications idéologiques qui prennent souvent trop de place dans ces débats.  

«Payerne est bien plus qu’une piste d’aviation»

Dans son allocution, la Conseillère d’Etat du canton de Vaud depuis 2022 après 16 ans au Conseil national, Isabelle Moret, rappelle d’abord que «la Broye porte une longue tradition de rêves et de conquêtes». En effet, l’enfant de la région Ernest Failloubaz devint en 1910 le premier pilote helvétique, à 21 ans, et resta dans la légende comme l’auteur du premier vol interurbain de Suisse entre son Avenches natale et la voisine Payerne. 

«Ce même esprit de pionnier anime encore Payerne, qui a su passer de l’aviation militaire à l’aviation civile, pour se positionner à la pointe des innovations technologiques du secteur», rappelle ensuite la conseillère d’État en charge de l’économie, de l’innovation, de l’emploi et du patrimoine. «Payerne, c’est bien plus qu’une piste d’aviation», complète la magistrate: «Le parc technologique de l’aéropole pourra accueillir jusqu’à 30 entreprises dans le domaine aéronautique / aérospatial avec un potentiel de 2 000 emplois à la clé. Le canton s’engage donc dans le développement de Payerne autant comme poumon économique pour la région que comme pôle d’excellence pour les compétences de demain». 

En effet, sans remonter jusqu’à Solar Impulse, ces innovations pour le futur du secteur sont déjà bien présentes «avec des projets comme Solar Stratos, qui prévoit de rejoindre la stratosphère uniquement avec l’énergie photovoltaïque ou Destinus, qui prépare des appareils volants à l’hydrogène». Dans la lignée des autorités suisses ou des acteurs du secteur, Isabelle Moret est certaine que «l’aviation a un rôle à jouer dans la transition énergétique», en soulignant le rôle pionnier de l’aviation d’affaires pour innover dans l’adoption et la mise à l’échelle de ces technologies.  

Un besoin de mobilité démontré

L’aviation d’affaires, c’est justement le secteur qui a connu un développement fulgurant dans la plateforme broyarde durant la dernière décade. «Avec des vols directs au départ de Payerne, il est possible d’atteindre 480 villes, 69 pays, sur 4 continents», explique Samuel Werner de l’entreprise SpeedWings qui a développé les services d’aviation d’affaires du terminal depuis 2016. En effet, alors que le règlement d’exploitation ouvrant la voie au vol civil date de 2013, le progrès a été immense entre les 24 vols de 2014 et les 1803 vols de 2023. 

La richesse de cette offre «démontre le besoin de mobilité», explique le dirigeant, qui souligne que «75% de ces destinations ne sont pas proposées par les vols de ligne au départ de Genève». Samuel Werner donne l’exemple d’une «entreprise de la région qui doit se rendre à Francfort avec plusieurs collaborateurs, et qui a le choix entre 6 heures de voiture, plusieurs escales d’avions de ligne ou moins d’une heure en jet».  

Si les avantages de l’aviation d’affaires sont clairs et se renforcent dans un contexte d’attente toujours plus longue dans les aéroports commerciaux, Samuel Werner constate que «Payerne répond à une vraie demande, et donc que le règlement doit mieux considérer les besoins des usagers et lever les contraintes contre-productives autant du point de vue économique qu’environnemental». Parmi les contraintes rigides les plus difficiles à intégrer dans un secteur qui a besoin de souplesse, le COO de SpeedWings cite par exemple l’interdiction des décollages chaque jour entre 12h et 13h30, même si le vol prévu à 11h55 arrive avec 7 minutes de retard.  «77% des refus des demandes des passagers sont directement liés au règlement trop restrictif», conclut Samuel Werner. La marge de progression est donc bien réelle. 

AVISTRAT – Adapter les règles aux besoins 

Connu pour son rôle central dans le cadre de l’ouverture de l’aérodrome de Payerne à l’aviation civile notamment, Me Pierre Moreillon, président d’honneur d’AEROSUISSE, s’intéresse aussi au futur. «L’évolution de la demande de mobilité aérienne, les nouvelles technologies et les questions énergétiques, entre autres, appellent des adaptations de l’infrastructure aéronautique et de son exploitation. Ces besoins doivent être pris en compte par le Conseil fédéral qui détient la haute main de la planification dans ce domaine», explique l’avocat. 

Les objectifs de l’ambitieux programme AVISTRAT, réalisé sous la conduite de la Confédération, prévoient que le «système aéronautique anticipe les attentes socio-politiques, soit conçu de manière à ce qu’il puisse être utilisé conformément aux attentes et soit capable d’évoluer de manière dynamique». Encore faut-il que ces attentes socio-politiques soient dûment prises en compte. 

Excellent connaisseur du domaine, Pierre Moreillon identifie plusieurs axes qui permettraient une augmentation de l’efficience générale du système. Dans la lignée des buts d’AVISTRAT, l’avocat souligne non seulement l’importance d’«écouter les besoins des utilisateurs et des bénéficiaires du système pour adapter l’offre aéroportuaire à la demande», mais également celle de la simplification: «réduire la pression normative, simplifier et accélérer le traitement des décisions, adapter le cadre règlementaire aux besoins avérés». 

Justement, pour que les règles du jeu soient en phase avec le terrain où la partie se déroule, le président d’honneur d’AEROSUISSE considère d’autres améliorations souhaitables encore :«Le Plan sectoriel des transports, partie Infrastructure aéronautique (PSIA) est hélas devenu trop rigide. Un assouplissement est souhaitable. L’aviation, qui est à certains égards le parent pauvre de la politique des transports, doit aussi pouvoir gagner en dynamisme dans les instruments de planification des cantons».

Sur la base de son expérience, Pierre Moreillon rappelle les recettes connues du succès des projets complexes. Il importe «d’entendre la réalité du marché et de penser en réseau». Pour conclure sur l’importance du collectif, il note qu’«il faut oublier l’esprit de clocher: chaque aérodrome a ses spécificités et gagne à les faire valoir au sein du réseau qu’il forme avec les autres. Il est souhaitable que de concert avec le tissu socio-économique et ses représentants, le réseau aéroportuaire romand puisse faire d’AVISTRAT un atout pour la Romandie dans son ensemble». 

Sonder les aérodromes pour mieux comprendre les attentes 

En espérant des informations concrètes, la dernière des présentations de la journée était attendue avec impatience, avec la présence de trois experts pour aborder les défis auxquels les aérodromes suisses devront faire face dans les prochaines années et décennies. En premier lieu, Francine Zimmerman, co-responsable de la division stratégie et politique aéronautique de l’OFAC a donné le cadre de l’évolution stratégique en cours de réflexion sur une «période de 10 ans». En rappelant que «l’espace aérien est une ressource rare et limitée», la représentante de l’OFAC a confirmé que le résultat attendu de la nouvelle stratégie est «un système sûr, performant, respectueux de l’environnement et à même de satisfaire les besoins des usagers» 

Pour définir les besoins des usagers, l’OFAC se repose majoritairement sur l’ASA, l’Association Suisse des Aérodromes, dirigée par un ancien du service, Peter Tschümperlin. L’ASA a donc soumis un questionnaire à ses membres leur demandant leurs visions du futur – ses opportunités, ses défis, ses espoirs.  «L’aviation est de plus en plus au centre de l’actualité», constate le président de l’ASA, qui insiste sur le «soutien juridique et financier nécessaire pour continuer à exister et conserver le paysage des aérodromes suisses dans sa forme actuelle». 

Toujours en cours, ce sondage a déjà permis d’identifier quelques tendances communes dans le secteur. Alors que les réponses confirment qu’il n’y «aura pas moins de défis dans l’avenir», les retours concrets s’alignent avec la tendance générale de l’industrie: innover pour limiter les nuisances, d’abord par le carburant durable puis par les nouveaux types de moteurs, tout en restant ouverts aux véhicules d’avenir, autonomes ou à décollage vertical. 

Tous les acteurs économiques devraient être entendus 

Pour AERIA+, il y aurait de grands bénéfices, autant pour la société que pour l’industrie, à élargir le champ des structures et organisations consultées. Pour préparer l’avenir avec pertinence et en prenant en compte les besoins actuels et futurs, les attentes explicites et implicites, il faut avoir un panel de points de vue qui correspond à la variété des usages et des ambitions. Alors que le projet AVISTRAT prévoit de consulter le tissu socio-économique pour orienter sa stratégie d’avenir, AERIA+ va continuer ses efforts pour renforcer la plateforme aéroportuaire romande en soutenant l’évolution de l’espace aérien helvétique et en faisant entendre la voix des milieux économiques et industriels qui font la prospérité du pays.  

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