Début juin, Genève Aéroport a organisé le premier Forum sur les carburants durables pour l’aviation. Un événement qui a réuni une centaine d’experts, d’industriels et d’acteurs du transport aérien, avec comme objectif principal d’accélérer la production et la distribution à grande échelle des carburants d’aviation durables, un levier essentiel pour décarboner le secteur. De quoi parle-t-on lorsque l’on évoque ce type de carburants? A quel niveau se fixe leur production à l’heure actuelle? Etat des lieux.
A l’invitation de Genève Aéroport, les acteurs du secteur ont partagé le 5 juin dernier leur vision du futur de ce carburant, autant sur des questions liées à la production ou à l’approvisionnement que des retours d’expériences autour de la législation européenne, qui prévoit l’obligation d’incorporer une quantité minimum de carburants d’aviation durables (CAD, ou Sustainable Aviation Fuels, SAF, en anglais) dans le kérosène, en prévision d’une obligation équivalente qui entrera en vigueur en Suisse dès 2026. «Ce forum contribuera, je l’espère, à augmenter la production à grande échelle des carburants aériens durables et aidera l’aéroport de Genève à résoudre l’équation lui permettant de livrer du SAF aux opérateurs de la plateforme», avait déclaré en ouverture Gilles Rufenacht, Directeur général de Genève Aéroport.
Mais que désigne-t-on précisément par les termes «carburants d’aviation durables»? Il s’agit de biocarburants et de carburants de synthèse, qui permettent des réductions d’émissions de CO2 importantes par rapport au kérosène. Concrètement, ce carburant, issu de ressources renouvelables et durables, peut être produit à partir de déchets agricoles, d’huiles biologiques recyclées, d’algues, mais aussi de Co2 ou de méthane. Actuellement, les SAF sont généralement mélangés à des carburants traditionnels, permettant tout de même de réduire considérablement les émissions de gaz à effet de serre et d’améliorer ainsi la performance environnementale des appareils. «Les SAF constituent une composante essentielle des plans des compagnies aériennes en vue d’éliminer les émissions nettes de carbone d’ici 2050», résume ainsi l’Association du transport aérien international (IATA), qui a lancé un registre mondial de ces carburants.
Des difficultés d’approvisionnement
Si ces nouveaux carburants sont indispensables et constituent un levier incontournable pour atteindre l’objectif d’une aviation «Net Zero» d’ici 2050, le secteur fait face à une difficulté principale en la matière: l’approvisionnement reste actuellement insuffisant par rapport à la demande. Ainsi, la production de ces carburants durables devrait augmenter pour atteindre deux millions de tonnes en 2025, ce qui ne représente cependant que 0,7% de la consommation totale des compagnies aériennes, toujours selon l’IATA. «Le rythme de progression de la production doit être accéléré, tout comme les gains d’efficience pour réduire les coûts», déclare Willie Walsh, directeur général de cette institution. L’industrie aura probablement besoin de quasiment 500 millions de tonnes de ces carburants d’ici 2050, rappelle l’infrastructure aéroportuaire genevoise.
La Suisse, pionnière de l’aviation verte
Au cœur de ces nouvelles technologies pour une aviation plus verte, la Suisse occupe une position centrale, basée autant sur sa tradition technique que sur l’excellence de son tissu académique et professionnel. Présente au Forum genevois, l’entreprise suisse Metafuels, en collaboration avec l’Institut Paul Scherrer, a ainsi développé un nouveau concept: «l’aerobrew», une technologie «permettant de convertir le méthanol vert en carburant d’aviation durable». En fin de sa phase expérimentale finale, la société innovante vise un démarrage de sa production en masse en 2030.
L’événement a permis de mettre en lumière la chaîne de distribution de Genève Aéroport, qui sera prête à acheminer des SAF dans les années à venir: les différents acteurs réunis ont assuré que «plusieurs types de carburants sont aujourd’hui transportés via le pipeline qui débouche sur l’aéroport sans aucune contamination entre eux. La distribution de SAF fera partie du même écosystème». Le pipeline entre Marseille et Genève permet aussi d’éviter d’utiliser des transports à émission de CO2 tels que des camions ou bateaux.
Ce Forum a ainsi permis de confirmer que tous les acteurs du secteur à Genève se préparent activement à l’aviation décarbonée. Ce faisant, tous les acteurs de la plateforme aéroportuaire Genevoise s’alignent autant avec les engagements clairs du secteur au niveau international, résumé dans le projet «Net Zero 2050» de IATA, que le plan d’action retenu par le Conseil fédéral dans son rapport sur l’aviation début 2025.